Vous avez surement tous connu le fameux meuble TV/magnétoscope lors de votre scolarité, meuble à roulette qui annonçait une heure de cours plus cool avec la diffusion de films ou de documentaires. J’ai le souvenir heureux d’heures de visionnages de vieux films en noir et blanc, mais surtout des documentaires du commandant Cousteau. Ah le commandant Cousteau, vieux loup de mer qui m’a fait découvrir les richesses des océans ainsi que leur fragilité. Son bonnet rouge, sa Calypso, le sympathique Bébert Falco à ses côtés, mais surtout sa soif de conquêtes et d’aventure.
2016, la télé à tube cathodique et le magnétoscope bouffeur de bandes magnétiques ont disparu, mais la vie d’un des héros de mon enfance est portée sur les écrans dans une production française ambitieuse : « Odyssée » !!!
ODYSSÉE SUR LES TRACES DE JACQUES YVES COUSTEAU
Avant d’être un français aussi connu que Napoléon ou le Général de Gaulle, Jacques Yves Cousteau (JYC pour faire plus simple à l’avenir, si vous n’y voyez aucun inconvénient) fut un militaire de carrière. Loin des océans, c’est d’abord dans le ciel que JYC a connu l’aventure, mais surtout la guerre. C’est suite à une reconversion dans la Marine nationale que Jacques a trouvé une nouvelle source de motivation : la mer. Plongée, films documentaires et l’ambition de faire des profondeurs le lieu parfait pour l’avenir de la découverte et de l’expansion de la France, alors que pendant ce temps-là, les USA et l’URSS avaient plutôt la tête tournée vers les étoiles… Une vie bien rangée avec deux enfants et une femme aimante, JYC semble connaitre le bonheur, mais l’appel des profondeurs se fait de plus en plus présent… En 1950, sous l’impulsion de sa femme, JYC va investir dans un vieux rafiot, « La Calypso », et c’est à partir de ce moment-là que nous allons vraiment faire connaissance avec notre commandant.
« L’Odyssée » est un biopic sur la vie complexe et obscure de Jacques Yves Cousteau. Un personnage aux nombreux secrets, mais surtout aux nombreuses facettes : père, explorateur, chef d’entreprise, homme de médias et accessoirement… mari. Le défi de ce film est de nous montrer l’exceptionnelle vie de cet homme, mais sans jamais idéaliser cette image très vendeuse qu’il a toujours su mettre en avant. On y apprend ses réelles motivations, son don pour la manipulation, ses relations tendues avec sa femme, mais surtout la relation orageuse entre lui et son plus jeune fils : Philippe.
Pour incarner l’homme au centre de toutes les attentions, le chef d’un royaume dont le château fut cette vieille et fatiguée « Calypso », nous retrouvons une valeur sure du cinéma français : Lambert Wilson. J’avais très peur de voir Cousteau vulgairement singé, mais j’ai rapidement était conquis par l’interprétation de Wilson. Jamais dans l’imitation, mais plutôt dans la composition d’un personnage aussi attachant qu’agaçant. Audrey Tautou, qui interprète Simone, l’épouse de JYC, a beaucoup plus de mal à être convaincante, et son vieillissement physique forcé a eu tendance à me faire sortir du film. Quant à Pierre Niney en Philippe, fils de, Cousteau… Génial, sincère, touchant et qui déclenche immédiatement l’empathie chez le spectateur. Pour résumer, « L’Odyssée » est un honnête portrait d’un homme qui a toujours caché sa vraie nature, mais que l’on découvre réellement à travers sa famille.
PLUS BELLE LA VIE, PAPIER GLACE ET CALYPSO
Hormis le sujet de base qu’est la vie de Cousteau, c’est surtout la beauté des images qui m’a donné envie de voyager avec JYC à la découverte de cet immense continent bleu qui compose majoritairement notre belle planète. Jérôme Salle, le réalisateur de « L’Odyssée », est un réalisateur dont j’apprécie énormément le travail. De son adaptation de la bd « Largo Winch », à l’excellent « Anthony Zimmer » (dont le remake « The Tourist » est une vaste fumisterie), en passant par le brutal « Zulu », Salle est un réalisateur français talentueux qui possède une vraie ambition de cinéma. Avec lui aux manettes d’un film, je n’ai jamais l’impression de regarder un vulgaire téléfilm au cinéma comme trop souvent pour la majorité des productions françaises actuelles. « L’Odyssée » reste dans cette lignée avec une photographie splendide, un hommage respectueux de la qualité et de la technique avant-gardiste des documentaires de JYC. Jérôme Salle fait briller nos yeux avec des plans sous marins magnifiques, des rencontres avec des créatures aussi amicales que menaçantes, mais aussi avec la mise en valeur de ses personnages comme témoignant de son admiration non dissimulée pour la famille Cousteau. J’ai parfois eu l’impression de regarder de belles photos imprimées sur du papier glacé, paradoxalement, cette beauté figée a créé une distance presque abyssale entre moi et le film.
Je suis un peu plus déçu par la gestion des acteurs… « L’Odyssée » a pour volonté de nous montrer le vrai Cousteau, une mise à nu d’un homme. Dommage que les interactions entre les personnages ne soient pas toujours très jutes, souvent trop théâtrales pour paraître réalistes. J’ai eu la sensation de voir trois acteurs talentueux (Wilson, Tautou et Niney donc) complètement sous exploités, et encore, je vous épargne un Albert Falco à l’accent caricatural qui promet à son interprète un rôle assuré dans la série « Plus belle la vie ». L’ivresse des profondeurs me rend méchant, je vous l’accorde, surtout que « L’Odyssée » reste un projet de cinéma français très ambitieux par le choix de son histoire, sa qualité visuelle et sa mission d’être le plus honnête possible au sujet de son héros, tout en gardant la magie et l’émerveillement liés au travail de JYC.
À voir? Pour la beauté de ses images, pour l’incroyable destin de la famille Cousteau. Un film qui ne veut pas tomber dans l’hommage facile, mais qui souhaite nous faire découvrir une famille et son influence sur la découverte des Océans et leur protection.
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