Quand Devilman Crybaby a débarqué sur Netflix, je me suis rué dessus car la série est réalisée par Masaaki Yuasa! Depuis que l’ai découvert, je ne me lasse pas de sa folie. Pourtant, j’ai vite lâché la série, surpris par sa tonalité. Mais j’ai fini par la reprendre il y a peu.
Préambule
Devilman Crybaby est l’adaptation du manga Devilman de Go Nagai (le « papa » notamment de Goldorak). Si je ne connais pas le manga, on reconnait d’emblée le look très particulier de Devilman, avec ses ailes et son aspect un peu loup-garou! Et je re-découvre le coté subversif, misanthrope et acide du mangaka à l’occasion! Pour une oeuvre qui a presque 50 ans, c’est assez surprenant. Ou navrant de se dire que l’on a pas tant évolué que cela (ou pas toujours en bien)!
J’avoue avoir été décontenancé par la version animée, qui est très explicité sur le sexe et la violence. Non pas que cela me choque (après avoir vu la série Spartacus, je suis blindé en la matière)! Mais que cela tranche singulièrement avec les productions habituelles de Masaaki Yuasa. Si c’est toujours très barré, très coloré et acidulé, il y a ce coté presque enfantin, voire naïf. Ici, ce n’est pas du tout le cas. Et il m’a fallu un petit moment pour m’y faire! La série est donc résolument destinée aux adultes, contrairement aux habitudes!
Mais une fois le cap passé, on retrouve les caractéristiques « habituelles » du réalisateur. Un visuel très épuré et simple qui permet une animation débridée et folle (quoique un peu moins ici). Si vous n’êtes pas familier du travail du réalisateur, il vous faudra sans doute un petit moment pour vous adapter à son style.

Synopsis
Akira Fudo est un jeune adolescent chétif et un peu timide que personne ou presque ne remarque. Mais sa vie va changer quand son meilleur ami Ryo Asuka va l’emmener à une soirée » Sabbat ». Il s’agit en faite d’une orgie démoniaque (au sens premier du terme) pendant laquelle Akira va être possédé par Amon, un puissant démon. Mais Akira va garder sa nature humaine et pouvoir utiliser le pouvoir du démon. Il est désormais Devilman, une créature mi-homme mi -démon qui va lutter contre les démons et protéger les humains.

Akira va alors se transformer physiquement, ce que ne va pas manquer de remarquer une partie de la gent féminine. Fort de ces nouvelles capacités, il va travailler de concert avec Ryo. Ce dernier semble disposer de beaucoup de moyens et connaitre parfaitement les démons et leurs habitudes. Mais il ne semble pas tout dire de son agenda à son ami.

Car ce n’est plus ni moins qu’une guerre à grande échelle entre humains et démons qui se profile. Pas sur que l’humanité soit armée pour survivre à cela…
Mon avis
Le mal est dans la nature humaine
On retrouve dans Devilman l’idée aussi largement développée dans Garo que les démons ne font que profiter de la faiblesse humaine. Que ce sont ces travers qui permettent aux démons de vivre et de proliférer. Ainsi, Miki Kuroda, surnommée « Mi-ko », malade de jalousie de l’autre Miki (Miki Makimura), va elle aussi devenir un démon. Mais cette jalousie va l’aider à garder son humanité.
Mais ce sont bien les travers humains qui sont ici dénoncés. Car le démon, il n’est finalement mauvais que par « essence ». L’être humain, lui, l’est pas choix (ou plus souvent par bêtise). J’en veux pour preuve les scènes de lynchage vue à la fin de la saison (l’épisode 8 est assez douloureux à ce niveau), lorsque l’existence des démons est révélée. Une vraie paranoïa s’installe alors, s’ajoutant au chaos déjà semé par les démons. Ces derniers n’ont presque que plus rien à faire..

C’est finalement la faiblesse des hommes et leur propre cruauté qui sert de terreau aux démons.
Le bien contre le mal
Résumer Devilman à une lutte du bien contre le mal serait simpliste, même si cela reste une composante de l’oeuvre. Déjà, le personnage de Devilman en lui même échappe à tous les stéréotypes en la matière. Pas démoniaque, mais plus vraiment humain, il est entre les deux factions, même si son coeur balance évidement pour l’humanité.
Et d’ailleurs, à ce titre, le personnage d’Akira n’échappe par contre pas aux conventions de personnages de nekketsu. Un héros un peu naïf, doté de grands pouvoirs et qui ne voit pas forcément le mal. C’est aussi un orphelin (ses parents seront tués par les démons). Et il s’inquiète plus des autres que de lui-même; il ne pleure que pour les autres, jamais pour lui (d’ou le « crybaby »). Bref, il coche la plupart des cases du genre!
Et par ailleurs, l’intrigue va révéler quelques surprises concernant cette notion de bien et de mal…
Le mythe dépoussiéré
Comme dit en préambule, je ne connais pas le manga original de Go Nagai. Malgré tout le respect que j’ai pour le mangaka, la franchise avait pour moi un coté un peu « vieillot » (elle date des années 70), avec un graphisme un peu désuet. Ce Devilman Crybaby remet les pendules à l’heure avec sa vision actualisé et visuellement décoiffante! Du coup, pas l’impression de voir une série qui joue sur la nostalgie, mais plutôt qui propose une vraie vision actualisée. Un peu comme le fabuleux remake de Battlestar Galactica qui sublime le matériel un peu cheap et bling-bling de la série originelle de 78.

Le tourbillons des émois adolescents
Si Devilman et cette adaptation sont une allégorie pour pas mal de choses (la guerre, la violence humaines,..), celle qui est la plus visible ici à mon sens, c’est l’appel de la puberté! Akira est pris dans un tourbillon d’émotions et de sentiments, comme tout adolescent. Mais ici tout est amplifié, exacerbé (je sais pas vous, mais moi par exemple, j’ai jammais fait de soirée « Sabbat »). Ce nouveau pouvoir fait écho à la puberté. Quelque chose d’à la fois grisant et inquiétant car nouveau.

Des démons très japonais
Vous allez dire que c’est une évidence, mais les démons de ce Devilman Crybaby ont des looks très japonais. Ici on est donc loin du démon à l’européenne, mais bien des Akuma et autres Yokai! Certains rappellent d’ailleurs pas mal les estampes anciennes que j’avais pu voir il y a 2 ans lors d’une exposition consacrée au sujet au musée du quai Branly. Un univers fantastique et fantasmagorique que j’affectionne tout particulièrement!
Au final
Malgré un Masaaki Yuasa qui sort de son terrain de jeu habituel, ce Devilman Crybaby est une vraie réussite! Mais une réussite à ne pas mettre entre les mains de plus jeunes spectateurs! Violences, bain de sang et sexe sont au rendez-vous!

Mais le réalisateur fait preuve une fois encore de son talent et de son grain de folie. Même si j’ai trouvé cette folie moins prononcée qu’à l’habitude, l’idée étant de servir le matériau originel sans trop le déformer je pense. Un manga qui reste tellement actuel! L’humanité doit se défaire de ses travers sous peine d’extinction! Et si ce ne sont pas les démons qui s’en chargeront dans la vraie vie, peut-être qu’un virus le fera..
Du coup, comme le disais, cette série Devilman Crybaby dépoussière vraiment la licence qui pour moi était un peu vieillotte, mais qui véhicule des thématiques intéressantes. Cela me donne envie de regarder d’autres séries ou films (avec la crainte d’être forcément déçu). Cette coproduction Netflix nous laisse espérer d’autres pépites sur le géant du Streaming!